Deuxièmes Journées Perception Sonore 2012

10 et 11 décembre 2012

CNRS Laboratoire de Mécanique et d'Acoustique

31, Chemin Joseph Aiguier

13009 Marseille


« Ecoute cette écriture ! » : sonifier le mouvement d’écriture pour le diagnostic de la dysgraphie.


Jérémy DANNA1, Vietminh PAZ-VILLAGRAN1, Charles GONDRE2, Mitsuko ARAMAKI2, Richard KRONLAND-MARTINET2, Sølvi YSTAD2 et Jean-Luc VELAY1

1 Laboratoire de Neurosciences Cognitives, LNC, CNRS UMR 7291, Aix-Marseille Université, 3, place Victor-Hugo 13331 Marseille Cedex 3
2 Laboratoire de Mécanique et d'Acoustique, CNRS, UPR 7051, 31, chemin Joseph Aiguier 13402 Marseille Cedex 20

1. Introduction
Le diagnostic de la dysgraphie, trouble dans la production de l’écriture, s’effectue par le test BHK. Ce test ‘papier-crayon’ analyse la qualité de la trace écrite et la vitesse globale de production. Grâce aux nouveaux outils numériques (comme les tablettes graphiques), les variables ‘cachées’ liées au mouvement d’écriture deviennent accessibles pour compléter la caractérisation de la dysgraphie. La finalité poursuivie ici est donc d’identifier ces variables et de les rendre perceptibles grâce à leur sonification. Si nous y parvenons, nous devrions être capable de reconnaître une écriture d’enfant dysgraphique ‘à l’oreille’. C’est ce que nous avons testé en demandant à des auditeurs d’évaluer la qualité de différentes écritures sonifiées sans les voir.
2. Méthode
Pré-expérience : Cinq enfants dysgraphiques, cinq enfants normoscripteurs et cinq adultes ont écrit 8 fois ‘lapin’ en écriture cursive. La vitesse de leur écriture a été sonifiée avec un son de frottement sur une plaque métallique, ainsi que les moments où leur écriture n’était pas fluide avec un son d’impact. Enfin, le volume de ces sons variait en fonction de la pression exercée par le stylo sur la feuille, de manière à percevoir les levers de stylo traduits par des silences. Expérience : 48 auditeurs adultes ont écouté et évalué la qualité de l’écriture des 15 scripteurs sans savoir à quel groupe ils appartenaient. L’expérience comprenait deux conditions : une ‘implicite’ où les auditeurs n’avaient aucune information sur les sons qu’ils entendaient, et une ‘explicite’ où les auditeurs connaissaient la signification des sons de chaque variable. Les notes moyennes attribuées à chaque groupe de scripteur ont ensuite été calculées dans les deux conditions d’écoute afin d’effectuer des analyses de variance et de cluster.
3. Résultats
En condition implicite, deux tiers des auditeurs ont réussi à discriminer significativement l’écriture des enfants dysgraphiques de celle des enfants et des adultes normoscripteurs. En condition explicite, tous les auditeurs ont discriminé les trois groupes de scripteurs.
4. Discussion
La sonification de trois variables liées au mouvement d’écriture suffit pour évaluer la qualité d’une écriture et reconnaître ‘à l’oreille’ celle d’enfants dysgraphiques. Nous pensons que ces variables pourraient peut-être compléter la caractérisation de la dysgraphie. La prochaine étape est d’utiliser le feedback auditif de ces trois variables pour permettre à l’enfant dysgraphique d’améliorer son geste d’écriture en temps-réel.