Pathologie de l'audition.


Lundi 10 décembre, 11:30 - 12:15

Yves Cazals

D.R. Inserm, Université Aix Marseille, Laboratoire de Neurosciences Intégratives et Adaptatives, UMR 7260, Marseille.

Décomposition de la parole en modulations d'amplitude et de fréquence : outil d'étude pour l'audition normale et pour les malentendants.

On sait depuis des décennies qu’une bonne intelligibilité phonémique de la parole peut être obtenue en transmettant les variations d’énergie acoustique (modulations d’amplitude) dans différentes bandes de fréquence. Si :
- les bandes de fréquence sont adjacentes,
- filtrées avec des pentes de réjection assez raides et,
- couvrent la majorité de l’étendue fréquentielle de la parole avec un espacement à peu près logarithmique,
alors de quatre à six bandes seulement suffisent à transmettre l’intelligibilité phonémique. L’emploi d’environ une cinquantaine de bandes de fréquence engendre une perception quasiment identique à l’original. Pour un nombre de bandes intermédiaire l’intelligibilité phonémique est bien transmise mais les caractères de tonalité et de timbre (essentiels pour transmettre l’intonation et l’identification du locuteur) sont détériorés. Une perception identique à l’original est obtenue si en plus des variations temporelles d’énergie on transmet aussi les variations de fréquence (modulations de fréquence, ou structure fine) dans chaque bande. Il n’est pas clairement établi si le traitement perceptif des modulations de fréquence est un processus autonome ou s’il résulte seulement d’une analyse plus fine en modulations d’amplitude. Diverses données de perception de la hauteur tonale suggèrent un traitement autonome. Ainsi un son pur de forte intensité excite de nombreux filtres cochléaires mais n’induit qu’une seule tonalité. Des périodicités variables dans des filtres haute fréquence peuvent induire la perception d’un fondamental manquant dans une bande de fréquence très inférieure. De plus la perception mélodique disparaît pour des fréquences supérieures à environ 4-5 kHz en excellente correspondance avec la limite de verrouillage en phase des fibres du nerf auditif. Les études chez les malentendants n’ont pas apporté non plus de réponse claire. Dans une étude récente nous avons montré que la limitation de la profondeur d’extraction des modulations de fréquence (pertinente avec les données physiques, physiologiques et perceptives) produit une meilleure intelligibilité. Des études similaires chez des malentendants ont indiqué qu’une faible proportion de sujets malentendants présente encore dans ces conditions des déficits d’intelligibilité phonémique qui semblent seulement en partie explicables par une détérioration de décomposition des modulations de fréquence en modulations d’amplitude.


Lundi 10 décembre, 12:15 - 13:00

Olivier Macherey

Laboratoire de Mécanique et d'Acoustique, CNRS, Marseille.

Implants cochléaires: mécanismes d'excitation du nerf auditif et implications pour les stratégies de codage des sons.

L’implant cochléaire (IC) a pour but de restaurer l’audition de patients présentant des pertes auditives sévères à profondes. L’IC stimule directement les fibres du nerf auditif par l’intermédiaire de plusieurs électrodes implantées par chirurgie à l’intérieur de la cochlée. La plupart des patients implantés parviennent à suivre une conversation normale dans un environnement calme et certains d’entre eux utilisent couramment le téléphone. Cependant, leurs performances chutent considérablement lorsque l’environnement sonore se complexifie et qu’ils doivent, par exemple, reconnaitre de la parole dans du bruit. Notre hypothèse de travail est qu’une meilleure connaissance des propriétés du nerf auditif stimulé électriquement peut guider le choix des paramètres de stimulation utilisés dans l’IC. Nous illustrerons notre démarche à travers trois séries d’expériences. La première s’intéresse aux effets de la polarité du stimulus électrique sur les réponses des fibres nerveuses. Nous montrerons que, pour des courants de stimulation élevés, les fibres répondent de façon préférentielle à proximité de l’électrode intra-cochléaire jouant le rôle d’anode. Ce résultat nous a conduits à tester l’effet d’impulsions électriques asymétriques sur la perception des sujets implantés. Nous montrerons, dans une deuxième série d’expériences, que ces impulsions asymétriques permettent d’étendre la gamme de fréquences que les sujets sont capables de percevoir. Enfin, la troisième série d’expériences étudie si ces mêmes stimuli peuvent améliorer la perception de la parole et de contours mélodiques. Les résultats de ces derniers tests seront discutés en mettant en avant leurs implications pour les stratégies de codage des sons.